L’apport de solutions extérieures innovantes est souvent identifié comme l’un des objectifs des externalisations de services ou des changements de prestataires. Dans d’autre cas, l’arrivée d’un nouveau fournisseur impose la mise en place d’un nouveau delivery model : découpage des services, réalisation de tout ou partie des prestations hors-sites, nouveau modèle financier, etc.
Les clients ont alors à faire face à une nécessaire réflexion sur l’ordonnancement des travaux à mener. Même si souvent la réversibilité, transfert de flambeau entre le prestataire sortant et le fournisseur entrant, est à conjuguer avec l’étape d’initialisation du nouveau service et les transformations qui s’en suivent, il est clairement nécessaire de distinguer les deux projets qui ont des objectifs bien différents.
Le changement de prestataire est généralement une bonne occasion de remettre à plat les pratiques afin d’optimiser les processus, les outils ou encore l’organisation des équipes. Bien que louable, cette ambition doit être couplée d’une vraie réflexion sur les objectifs et la cible. En effet, le repreneur pourra difficilement gérer à la fois sa montée en compétence et la transformation des pratiques à mener. Deux options se présentent naturellement.
Profiter du changement d’acteur pour transformer les pratiques ?
Il peut s’avérer pratique d’opter pour la première option afin de cumuler les bénéfices et gagner du temps. Mais cette voie crée de la complexité pour le repreneur qui ne peut pas prendre le fournisseur sortant et ses processus comme référentiel. Parmi la foultitude de données à retenir lors de la réversibilité, le repreneur devra réussir à distinguer la cible de la situation actuelle, mais aussi les contraintes fortes des simples habitudes. Il déduira plus difficilement sa marge d’adaptation et d’optimisation et son « nouveau regard » sera difficilement mis à contribution dans l’élaboration de la cible.
En tout état de cause, une réflexion sur la cible, menée avant tout processus d’appel d’offres, permet d’éviter les incompréhensions du prestataire. L’entrant ne doit pas se contenter de répliquer le scope du sortant et son fonctionnement alors que le contrat permettrait de couvrir un spectre plus large.
Cette approche nécessite donc d’avoir une idée précise de la situation existante ainsi que de l’organisation et des processus en cible. Ceux-ci doivent être décrits précisément dans l’appel d’offres pour permettre au prestataire d’identifier les objectifs et les enjeux mais aussi la marche à franchir. Cette approche implique donc que la DSI entreprenne une réflexion en amont sur les objectifs de la transformation.
Choisir de transformer les pratiques en même temps que de fournisseur nécessite une phase de probation plus longue pour assurer plus longtemps la présence des ressources sortantes. Il faut en effet à la fois valider pendant cette phase les acquis du repreneur et le nouveau modèle de delivery, le nouveau processus ou encore le nouvel outil. Les équipes risquent de subir la coexistence de l’ancien mode de fonctionnement avec la cible encore en rodage afin de permettre des « retours arrières » pour assurer le service.
Attendre que le repreneur s’installe pour se lancer dans un chantier d’optimisation ?
La seconde option semble plus sécurisante car elle permet de chercher en priorité à maintenir le niveau de service actuel en ne bouleversant pas les pratiques. Elle permet également de laisser au fournisseur entrant un temps de réflexion et d’analyse pour apporter des améliorations tout au long de la durée du contrat.
Le client aura cependant l’impression de moins maîtriser son destin en laissant le soin au repreneur d’être force de proposition. Le risque d’inertie existe également si prestataires « sortants » et « entrants » sont des entreprises ayant un ADN similaire au même mode de fonctionnement. Cette alternative implique également une phase d’initialisation plus importante pour le fournisseur et donc des coûts supplémentaires à prévoir.
Ces obstacles potentiels sont néanmoins surmontables dès lors que la transformation fait partie des engagements contractuels des deux parties :
- La mise en place d’une évolution progressive du delivery model, le conditionnement de gains de productivité à l’optimisation de certaines pratiques, ou la mise en place d’indicateurs de suivi de la proactivité des centres de services permettent de faire progresser la relation dans le temps.
- Le conditionnement de l’activation des jalons de transformation à la production de certaines garanties de bon fonctionnement (plans de délocalisation, atteinte de niveaux de services, etc.)
- Une relation de partenariat fondée sur le partage des investissements et des gains obtenus de la démarche d’amélioration continue peut être très incitative.
Libérez la créativité des prestataires
Quelle que soit l’approche choisie, il est souhaitable de ne pas imposer un cadre trop rigide pour laisser aux fournisseurs la possibilité de proposer des modes de fonctionnement au regard de leurs expériences avec d’autres clients. Certains acteurs seront d’ailleurs bien plus à l’aise avec la possibilité d’utiliser leurs propres outils, d’implémenter leur processus ou de mettre en place une organisation leur permettant de mutualiser des compétences et gagner en efficacité. Imposer un mode de fonctionnement à un prestataire peut être en réalité contre-productif.
Il est par conséquent essentiel de considérer le changement de fournisseur comme une bonne fenêtre de tir pour revoir ses pratiques et se transformer. Le challenge est donc de mesurer le bon niveau de contrainte, décrire uniquement les contours des services attendus ainsi que les obligations immuables afin d’initier d’emblée une relation équilibrée. Il faut également anticiper et doser le changement interne pour maximiser la performance des centres de services. Qu’elles soient simultanées ou concomitantes, les clés de la réussite d’un couple transition / transformation sont l’anticipation des objectifs et la maîtrise du planning. Leviers clés qui feront l’objet de notre 3ème et dernier article.