La généralisation des usages du numérique met le système d’information sous les feux de la rampe. Au sein des entreprises, l’impatience des Directions métiers grandit, face à une DSI souvent perçue à tort ou à raison comme rigide, lente, opaque et coûteuse… Qu’est-ce qui est à l’origine de ces différences de perceptions ? Comment minimiser les divergences souvent biaisées et aligner les attentes de chacun ?
De l’impatience… à l’incompréhension
Au-delà de l’impatience, on remarque même une certaine incompréhension entre ces parties prenantes internes, dont la relation se base encore à tort sur un modèle « client – fournisseur ». Or la forme et la qualité de la relation entre les Métiers et la DSI sont cruciales pour pleinement tirer parti des apports de l’IT à chaque étape de la vie du SI : planification des grands investissements, priorisation et l’arbitrage des demandes, étude et expérimentation des solutions, réalisation des projets… et bien sûr maintien de la qualité de service.
Ainsi, il convient d’identifier et de mettre en œuvre les actions qui vont permettre à la DSI de devenir un véritable partenaire à part entière des Métiers, jouant pleinement son rôle dans la stratégie de l’entreprise : création de nouveaux rôles d’interface, nouvelles méthodes projet, rapprochement des MOA et MOE, incubateurs d’innovation, cellules de développement rapide… Certains ont bien sûr déjà engagé cette transformation. Les leviers permettant de fluidifier les rapports DSI – Métiers sont basés pour la plupart sur des nouveaux modes de travail au quotidien, sur le développement de nouvelles compétences et sur des changements de postures dans la relation entre les acteurs. Il s’agit donc d’une véritable transformation managériale et humaine, à piloter de manière coordonnée et déterminée pour parvenir au résultat attendu.
Un passé lourd d’incompréhensions… des deux côtés !
Comment les Directions marketing, finance ou opérations perçoivent-elles aujourd’hui le système d’information ? Qu’est-ce que ce dernier leur apporte ? Comment vivent-elles leur relation avec la DSI au quotidien? Les verbatims révélant une tension entre ces deux univers sont nombreux :
« Trop cher et impossible de comprendre pourquoi »,
« Si toute nouvelle demande est prise en compte au mieux dans un an, comment puis-je atteindre mes objectifs ? »,
« Encore un copil projet à 20 personnes où on ne comprend rien mais où on nous demande quand même de valider »…
Côté DSI, la tension se fait aussi ressentir. De nombreux chefs de projets s’épuisent à livrer dans les temps et à respecter les coûts prévus tout en gérant les aléas : demandes d’évolution tardives, projets plus prioritaires, absence imprévue d’un expert, Directions métiers indisponibles pour faire la recette… On l’aura compris, les équipes projets métiers et IT travaillent souvent dans un climat d’incompréhension voire de défiance. Tous sont même convaincus que nul ne prend pas suffisamment en compte les contraintes de l’autre.
Une collaboration incontournable et toujours plus exigeante
Compte-tenu de ces difficultés, quoi de plus tentant pour un Directeur Métier que de choisir une offre du marché en sollicitant un intégrateur externe et se libérer ainsi des contraintes de fonctionnement de la DSI ? Beaucoup l’ont tenté mais se sont vite heurtés aux limites liées à l’intégration avec le reste du SI : cohérence des données, interface avec les autres applications de l’entreprise…
Temps réel, mobilité, utilisation instantanée de données toujours plus nombreuses, smart, transversalité des processus, animation de communautés et réseaux sociaux… les nouveaux services numériques et l’usage triple A (Anytime, Anyway, Anywhere) des clients renforcent le besoin de cohérence et de partage des données sur l’ensemble des activités de l’entreprise, qu’elles soient directement en contact avec les clients ou non.
La DSI doit prendre conscience que le niveau d’exigence (réactivité, agilité, disponibilité) des Métiers ne peut que croître avec ces nouveaux usages. Elle porte plus que jamais la responsabilité d’aligner le SI avec la stratégie d’entreprise et de le moderniser, de le rendre évolutif et ouvert. Elle doit en même temps s’inscrire dans le contexte actuel toujours plus contraignant de rationalisation des dépenses.
Formalisation de schéma directeur, refonte de portefeuille projet, création de chargés de relation métier, refonte des processus projet, réorganisation des MOA… Beaucoup d’évolutions ont été mises en œuvre ces dernières années pour accompagner l’avènement de l’entreprise numérique. Et si les acteurs de la DSI voient le long chemin parcouru (formalisation de processus pour réaliser, contrôler et améliorer ses activités, mise à disposition de catalogues de services…), les toujours plus exigeantes Directions métiers restent de leur côté sur leur faim.
Éloignement des interlocuteurs Métiers et DSI, dilution des responsabilités tout au long de la chaîne de valeur IT, recours systématique à l’arbitrage managérial sont autant de freins persistants à la proximité Métiers-DSI.
Allier capital humain et fonctionnement agile pour faire émerger le business partner
Dans le contexte digital, concurrentiel et économique actuel, la DSI doit se positionner en business partner des Métiers et devenir LE conseiller en innovation technologique au service de la performance opérationnelle et économique de l’entreprise.
La seule issue possible réside dans la prise de conscience partagée entre Métiers et DSI : maîtriser les coûts et produire de la qualité implique un dialogue et un alignement au quotidien dans les projets et dans la régulation de la demande. La DSI doit être à l’origine de cette transformation.
Les leviers de cette transformation sont de différentes natures. Tout d’abord, Métiers et DSI doivent partager une vision stratégique basée sur des objectifs et une planification communs. Sur le volet du capital humain, clé de voûte de la transformation, la mise en place de rôles clés permet de créer les passerelles de communication entre Métiers, DSI et utilisateurs. Leur efficacité est étroitement liée au volet Processus, qui doit permettre d’apporter souplesse et agilité dans la chaîne de valeur IT. Le volet Organisation, avec le rapprochement des équipes MOA / MOE permet quant à lui de lever les freins organisationnels qui empêcheraient ces rôles d’atteindre l’objectif escompté.
C’est donc bien tout un ensemble de leviers (qui feront l’objet de plusieurs articles à venir), centrés autour de la valorisation du capital humain de la DSI, qu’il s’agit d’actionner… Encore faut-il en avoir conscience !