Ces dernières semaines, les annonces de fuites de données clients ont fleuri (Apple, OVH, Ubisoft…) et attirent de plus en plus l’attention des médias. Excès de zèle, obligation ou vraie stratégie de relation client, que se cache-t-il derrière ces annonces de plus en plus visibles ?
Les données clients : un nouvel or numérique convoité
Quel que soit leur secteur, toutes les entreprises sont aujourd’hui exposées à la cybercriminalité. Certaines redoutent le vol de secrets industriels ou encore l’indisponibilité de leurs systèmes, mais ils partagent une crainte commune: le vol de données personnelles de clients, collaborateurs, prospects, partenaires…
Cette richesse des entreprises est particulièrement convoitée par certains cybercriminels, appâtés par le gain financier qu’elles peuvent représenter. En effet, sur les marchés parallèles, les données peuvent se monnayer jusqu’à plusieurs dizaines de dollars par enregistrement…
Des obligations réglementaires et légales qui vont se renforcer
Les initiatives se multiplient pour protéger ces données et la vie privée des individus face à ces nouvelles menaces. La loi informatique et libertés, mise à jour en 2004, vise depuis de nombreuses années à protéger les libertés individuelles et les données à caractère personnel de traitement illicites.
Elle a été complétée en août 2011 par le Paquet Télécoms, qui a renforcé les obligations des opérateurs de télécommunications dans ce domaine en imposant notamment la notification des violations des traitements de données à caractère personnel aux victimes. En ligne de mire, permettre aux abonnés de connaître les risques qu’ils courent quand la sécurité de leurs données est en cause. Des premières notifications de faible ampleur ont déjà eu lieu. Cette obligation sera étendue à tous les secteurs avec le projet de règlement européen qui devrait être publié en 2014 ou début 2015.
Mais au-delà de la protection de la vie privée, les attaques sur les infrastructures critiques des états inquiètent également la France et plus largement l’Europe. Deux textes sont attendus pour y remédier : un texte français imposant aux Organismes d’Importance Vitale (OIV) un certain nombre d’exigences de sécurité et de notification, audit… et un texte européen définissant des sanctions minimales pour punir les cyberattaques. Attendus dans les prochains mois, ces textes doteront les états et les entreprises de nouvelles armes pour lutter contre la cybercriminalité.
Entre totale transparence et protection des intérêts de l’entreprise, quel équilibre ?
Ces derniers mois, de nombreuses entreprises ont révélé avoir été victimes de piratages : Apple, Ubisoft, OVH… L’enjeu de ces communications ? Prévenir les clients que la sécurité de leurs données a été remise en cause, pour leur permettre de prendre les actions adaptées. Bien souvent, il s’agit d’un changement de mot de passe sur le service, qui peut signifier pour l’utilisateur un changement sur l’ensemble des services pour lequel il utilise le même mot de passe !
Il est intéressant d’observer les différences entre les notifications et ce que cela révèle sur la relation client des entreprises. OVH, par exemple a fait preuve d’une grande transparence technique – ce qui est logique vus ses clients et leurs attentes. Apple, cohérent avec ses habitudes de communication, a été assez lapidaire dans les informations délivrées et a prévenu les utilisateurs plusieurs jours après l’arrêt du service. Ils n’ont mis en ligne qu’une page permettant de suivre la remise en service des différents sites touchés.
Ubisoft a, quant à lui, eu une approche plus classique, proche de celles des grands acteurs du web qui ont connu des situations similaires (LinkedIn, Evernote…). Cependant, le groupe français a connu des soucis de surcharge de ces serveurs au moment de la communication des emails. Cela montre la nécessité et l’obligation de préparation face à ces évènements qui peuvent survenir à tout moment.
Et si les réglementations en place aujourd’hui imposent à ceux à qui elles s’appliquent une notification sans délai aux autorités et au plus tard dans les trois jours aux personnes, une question essentielle peut alors se poser : révéler les détails de l’attaque et les actions de sécurisation décidées ne peut-il pas permettre aux attaquants de poursuivre l’attaque en connaissance de cause ? Il s’agit dès lors d’une décision à peser soigneusement, en considérant à la fois les risques techniques et les risques réglementaires.
Se préparer à notifier ses clients, sans attendre les obligations réglementaires
L’enjeu est donc aujourd’hui de se préparer à notifier ses clients d’une violation de traitement de données personnelles. Un projet qui concerne réglementairement les opérateurs télécommunication, mais plus largement toutes les entreprises qui veulent préserver leur relation client et leur image !
Si les attaques ne peuvent être anticipées précisément, un cadre de stratégie de notification peut dès maintenant être élaboré en associant juristes, RSSI, DSI et direction marketing pour élaborer les processus et procédures de notification, le plan de communication et la logistique associée. Et rien de tel qu’un exercice de gestion de crise pour tester ces processus !