Sous les effets de la crise, les DSI doivent engager des efforts conséquents et rapides de réduction de la dépense IT. Dans ce contexte, l’externalisation des services IT dans des pays à bas coûts de production peut sembler, a priori, l’une des meilleures armes à leur disposition pour dégager des économies substantielles. Pourtant, si l’on y regarde de plus près, on constate que la crise ne profite pas forcément très directement à l’offshore. Les raisons à cela sont multiples.
L’offshore implique un engagement pluriannuel qui refroidit les DSI en temps de crise
Un tout premier élément de réponse réside simplement dans le fait que, contrairement à une idée reçue, les DSI ont plutôt tendance à ralentir ou retarder leurs opérations d’outsourcing en période de crise. La taille et le nombre d’opérations a ainsi significativement baissé sur l’année 2012 par rapport à 2011 (la baisse serait de l’ordre de 19 % au niveau mondial selon le cabinet Everest Group). Et ce ralentissement est d’autant plus significatif que le marché avait déjà marqué un sérieux coup de frein en 2011.
La raison de cette tension sur le marché de l’externalisation est assez simple : en période de crise, les entreprises sont beaucoup plus frileuses à signer des contrats pluriannuels. En effet, la mise en œuvre de ces contrats nécessite généralement des investissements importants. Investissements que les DSI ne sont pas en mesure de prendre (ou de justifier) en période de crise, et qui vont venir « dégrader » le ROI de l’opération, les gains économiques n’intervenant qu’à moyen terme, et donc pas sur le budget de l’année suivante. Il est clair que ce ralentissement a un impact sur la progression de l’offshore. Les grandes SSII « indiennes » tablent ainsi sur une croissance beaucoup plus faible de leur chiffre d’affaires en 2012 par rapport aux exercices précédents.
On peut pourtant se demander si ce ralentissement global du marché de l’outsourcing ne porte pas en lui le germe d’une augmentation de la part d’offshore dans les services IT. Ne serait-ce que sous l’impulsion des grandes SSII américaines et européennes qui, déjà très largement implantées dans les destinations offshores, pourraient accélérer le mouvement pour préserver leurs marges.
Des chiffres qui sous-estiment la réalité du marché
Il est cependant extrêmement difficile de savoir précisément quelle est la part de l’offshore dans les services IT. Le SYNTEC n’a d’ailleurs publié aucun chiffre sur le sujet depuis 2008 ! Selon les cabinets d’étude, cette part varie de 5 à 10% sur le marché français en 2012, et certains annoncent que l’offshore représentera 15% des services IT en 2014. Il semble assez clair que cette part est aujourd’hui sous-estimée. Un grand nombre d’études ne prend en compte que les prestations externalisées directement en offshore, faisant ainsi abstraction de la réalité opérationnelle. Les grands prestataires de services IT ont ainsi tous mis en place des modèles de production mondialisés dans lesquelles des « usines » onshore, nearshore et offshore interagissent entre-elles pour délivrer les services. Nombreuses sont également les SSII occidentales qui sous-traitent certaines activités auprès d’acteurs offshores locaux. Par ailleurs, les effectifs offshores des plus grandes SSII occidentales représentent déjà souvent plus de 30% de leurs effectifs totaux. Enfin, l’apparition de toutes les offres de type cloud, où par essence, les services sont délivrés par une main d’œuvre dont la localisation est complètement transparente pour les clients vient encore perturber la donne.
L’offshore : une solution à anticiper !
Finalement, en cette période de crise, le véritable frein à la progression de l’offshore dans la part des services IT se situe chez les donneurs d’ordre. D’abord parce que les impacts sociaux et la montée des tendances protectionnistes (on l’a vu récemment aux États-Unis) peuvent ralentir (voire ajourner) la mise en œuvre de ce qui est vécu comme une délocalisation dans l’opinion publique. Mais surtout parce que faire le choix de l’offshore ne peut pas être un choix purement opportuniste. Ce choix nécessite en effet de faire évoluer l’organisation de la DSI ainsi que sa stratégie de sourcing pour s’adapter aux spécificités de ce marché (différences culturelles, services standardisés, gouvernance et pilotage renforcé…). La courbe d’apprentissage n’est pas simple et les échecs restent assez nombreux tant d’un point de vue opérationnel, que d’un point de vue économique (notamment si on n’a pas anticipé sur le coût complet des services).
L’offshore ne peut donc être un choix de crise que si la DSI si est préparée en amont.