Article écrit en collaboration avec William Revah.
La mise en place d’un Plan de Continuité Informatique est souvent vue comme un poste de coût supplémentaire, une forme d’assurance pour couvrir des évènements rares. Dès lors, le bon sens conduit souvent à vouloir en réduire les coûts et donc à favoriser le secours sur des serveurs existants « hors production » (développement, recette, qualification, intégration, test, formation, pré-production) et notamment ceux de pré-production (plus proches de l’environnement réel).
Mettre ainsi à profit des ressources qu’on ne juge pas essentielles en cas de crise semble permettre d’optimiser leur usage – et au final les coûts du PCI. Cette assertion mérite cependant d’être confrontée au contexte de chaque organisation. Un tel secours est-il vraiment une source d’économie ? Réellement plus simple à mettre en œuvre ? Éligible pour toutes les applications ?
Prendre en compte les contraintes applicatives pour évaluer la complexité de mise en œuvre
Les environnements « hors-production » peuvent présenter des enjeux aussi forts pour les Métiers que leur environnement de production, notamment lorsque :
- les applications doivent évoluer rapidement ou régulièrement,
- les incidents applicatifs nécessitant correctifs sont fréquents.
Ces besoins métiers entrent ainsi en concurrence avec ceux liés à la mise en place du secours (construction du PCI, recette, tests, etc.). Si le métier est en charge de définir les priorités d’utilisation de ces environnements, il y a fort à parier que le planning de mise en œuvre du PCI devra être défini en fonction des plages d’usage laissées vacantes par les autres besoins.
Autant dire que pour les applications évoluant souvent ou victimes d’incidents à répétition, le projet de secours sera complexifié ; les phases de construction et de test du secours ne pouvant être déroulées, le métier exigeant la disponibilité de ces ressources pour d’autres besoins plus prioritaires à ses yeux. Contrainte d’autant plus forte dans un contexte au sein duquel la mise en production (MEP) ne serait pas complètement industrialisée.
Dès lors, la mise en œuvre d’un secours sur pré-production ne peut être envisagée sereinement que pour des organisations au sein desquelles la DSI priorise seule l’accès et l’utilisation des ressources hors-production. Il conviendra alors de privilégier les applications les mieux maîtrisées et les plus stables, afin de réduire au maximum les conflits avec les chantiers d’évolution applicative ou de correction de problèmes.
Ne pas conclure trop vite à une économie substantielle en évaluant les coûts cachés
Si le secours sur pré-production est considéré comme moins coûteux, c’est qu’il réduit le volume des investissements et la mise en œuvre de serveurs. Mais cette vision apparaît réductrice dès qu’on identifie les autres coûts à prendre en considération.
En effet, la majeure partie des coûts d’un projet de secours informatique réside souvent dans le pilotage, les études, les travaux d’infrastructures et le secours des données. Au final, les serveurs ne représentent parfois que 10 à 20% de l’investissement total. L’économie réalisée n’est donc pas nécessairement conséquente.
Par ailleurs, le secours sur pré-production peut également impliquer des coûts spécifiques. Bien souvent il s’agira de déménager les serveurs de pré-production, en général situés à proximité de ceux de production, et de les mettre à niveau en termes de configuration avec ces derniers. Il s’agira également d’études techniques complémentaires (ex : comment faire cohabiter des environnements de pré-production et de secours sur un même serveur?) pouvant nécessiter des enveloppes de charges supplémentaires. Enfin, en cas de coordination avec les métiers pour prise en compte de leurs contraintes (application en cours d’évolution, correction de bugs récurrents, …), des charges de gestion de projet complémentaires sont à prévoir.
Autant de points pouvant rendre le secours sur pré-production aussi voire plus onéreux qu’une solution dédiée de secours. Il convient donc de bien évaluer son coût en fonction de ces différents paramètres et de le comparer aux coûts des autres solutions envisagées.
Ne pas réduire le secours sur pré-production à sa composante économique
« La solution du bon sens est la dernière à laquelle songent les spécialistes » citait l’éditeur Bernard Grasset.
Nous l’avons vu, et contrairement à ce que le bon sens nous le laissait imaginer, le secours sur pré-production n’est pas une garantie d’économie.
Cette solution est à privilégier dans des contextes matures (maîtrise forte du processus de mise en production et des environnements hors production par la DSI), pour des applications stables (n’évoluant pas ou peu) et des environnements techniques adaptés.
Autant d’éléments à prendre en compte avant d’acter ou non la mise en œuvre de cette solution, notamment à l’aide de projets de virtualisation des environnements…