Le nouveau monde des infrastructures
Les gestionnaires d’infrastructures énergétiques (RTE, GRTgaz, ERDF, GrDF, TIGF…) ont clairement été séparés des commercialisateurs d’énergie par trois directives européennes successives ces dernières années. Ils appartiennent au monde régulé, c’est-à-dire qu’ils opèrent un service public. À ce titre, ils sont soumis à des contraintes réglementaires fortes contrôlées par la CRE[1] et ont le devoir de servir tous leurs clients sans discrimination.
Des clients aux profils variés…
Tous leurs clients ne se ressemblent pourtant pas et n’ont pas les mêmes besoins. Certes, il s’agit de clients « entreprises » (modèle en « B to B ») qui rémunèrent les gestionnaires d’infrastructures pour le service d’acheminement ou pour le service de raccordement direct de leurs installations industrielles sur le réseau (car leurs sites industriels consomment beaucoup d’énergie). Mais la comparaison s’arrête là, entre un industriel raccordé au réseau, une entreprise de négoce en énergie basée à Paris ou Londres et un grand groupe qui est en même temps commercialisateur et consommateur d’énergie (c’est le cas par exemple pour un groupe « énergéticien » qui produit lui-même l’électricité qu’il va vendre : il est raccordé au réseau électrique et paye pour ce raccordement comme pour l’acheminement ; s’il produit son électricité à partir de gaz, il sera de plus raccordé au réseau gazier et paiera là aussi le raccordement et l’acheminement).
Le paradoxe du sur-mesure non-discriminant
Les gestionnaires d’infrastructures sont traditionnellement mal à l’aise face au paradoxe d’une relation client « sur mesure » mais non discriminante[2]. Mais équité de traitement ne signifie pas uniformité de moyens alloués à la relation client. Au contraire.
Le principe de non discrimination se mesure à la valeur ajoutée apportée au client ainsi qu’à la qualité de service perçue par ceux-ci. En conséquence, pour assurer un niveau de valeur ajoutée et de qualité perçue identiques pour l’ensemble de leurs clients, les opérateurs d’infrastructures doivent fournir des services adaptés, et donc différents, en fonction des clients.
Un opérateur a par exemple mis en place avec notre aide une organisation dédiée à ses grands comptes. Pour ces clients, à la fois expéditeurs et consommateurs d’énergie, il est nécessaire de répondre à des enjeux et des besoins liés entre eux mais exprimés par des entités très éloignées les unes des autres (ces clients sont des grands groupes de milliers ou dizaine de milliers de personnes).
Les grands comptes
Qu’est-ce qu’une démarche grand compte pour un gestionnaire d’infrastructures ? Le gestionnaire d’infrastructures qui a identifié des grands comptes cherche à devenir leur fournisseur idéal. Pour atteindre cette position, il doit être prêt pour chacun de ces clients à :
- nommer un responsable unique qui garantit une démarche globale et cohérente,
- dépasser le mode d’organisation classique par fonction au profit d’une organisation en miroir à l’échelle nationale ou internationale du client,
- faire évoluer ses systèmes d’information pour mieux connaître le client ou lui apporter des services innovants,
- mettre en place une relation adaptée qui se traduit notamment par un plan de compte[3].
Un grand compte représente un marché en tant que tel. À ce titre, un marketing « one to one » doit être mis en place. Pour un grand compte, un fournisseur doit en effet être prêt à infléchir ses offres et sa stratégie relationnelle.
Une dernière catégorie de « grands comptes » intéresse aussi les opérateurs, sans être pourtant des clients : il s’agit des collectivités territoriales, parce qu’elles ont leur mot à dire dans l’entretien et le développement des infrastructures sur leurs territoires et parce qu’elles participent à la définition des politiques énergétiques qui impactent les gestionnaires ensuite (par exemple les PCET locaux ou les SRCAE en région). Là aussi, une démarche spécifique a tout son intérêt.
Adopter une démarche « clients grands comptes » participe donc de la résolution de ce dilemme : différencier sans discriminer. Par la mise en œuvre d’une organisation adaptée, les opérateurs d’infrastructures s’assurent la fidélisation de leurs clients grands comptes.
[1] CRE (Commission de Régulation de l’Energie) : autorité administrative indépendante chargée de veiller au bon fonctionnement des marchés de l’électricité et du gaz en France : http://www.cre.fr/
[2] Les opérateurs d’infrastructures ont l’obligation d’assurer des conditions transparentes, objectives et non discriminatoires d’accès aux réseaux de transport et de distribution de gaz et d’électricité : http://www.cre.fr/reseaux/principes/acces-non-discriminatoire-et-independance
[3] Plan de compte : document rédigé annuellement regroupant le diagnostic des enjeux du client, les objectifs du fournisseur et le plan d’actions associé.
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