Dans la lutte contre le réchauffement climatique, l’habitat pèse de tout son poids (1) .
Or, si la responsabilité environnementale des particuliers est une tendance lourde et si les français se considèrent déjà comme les « bons élèves » de l’Europe 2, force est de constater le fossé entre attitude et comportement, et donc la faiblesse des résultats sur l’évolution des consommations énergétiques 3.
Plusieurs facteurs à cela : la facture énergétique pèse encore peu dans le budget moyen des ménages (moins de 4%) ; ceux-ci méconnaissent la réalité de leurs consommations, a fortiori en chauffage collectif 4 ; en électricité et en gaz (qui représentent une part majoritaire et croissante des énergies consommées dans l’habitat), la hausse de la facture reste limitée, comparée aux autres pays européens 5.
Il est clair qu’il n’y aura pas d’évolution des comportements au rythme et à la hauteur des objectifs du Grenelle de l’Environnement, sans signal prix fort. A ce titre, les orientations prises par les pouvoirs publics constituent le premier facteur de changement. Or, force est de constater que le contexte de crise actuel tend à placer en retrait l’enjeu environnemental face aux préoccupations court terme de préservation du pouvoir d’achat des ménages :
- Le renforcement de la fiscalité verte (éco-prêt à taux zéro, crédit d’impôts…) va dans le bon sens, mais on peut craindre qu’en période de crise les particuliers restent peu enclins à investir dans des travaux coûteux d’efficacité énergétique ;
- La Contribution Climat Énergie qui devait contribuer à la prise de conscience par les ménages du coût carbone de leurs consommations d’énergies fossiles, a été remise en cause ;
- La loi NOME (Nouvelle Organisation du Marché de l’Électricité) fixe le nouveau cadre réglementaire des tarifs et des prix de l’électricité ; face à une éventuelle forte hausse des prix de l’électricité telle qu’anticipée et dénoncée par les associations de consommateurs, les particuliers vont être plus fortement sensibilisés aux économies d’énergie ; la loi devait aussi renforcer la lisibilité environnementale des consommations de pointe et ouvrir la voie à des offres de marché alternatives compétitives, mais reste à savoir quel sera l’ampleur du signal prix qui sera apporté dans la modulation des tarifs pour inciter les foyers à réduire leurs consommations électriques en pointe.
Au-delà du rythme de concrétisation des orientations du Grenelle, il n’y aura pas de changement décisif des comportements sans une réelle innovation des acteurs de l’offre pour permettre au consommateur d’accéder à des bénéfices immédiats du changement de ses comportements.
Trois drivers clés et complémentaires :
- la prise de conscience par le consommateur de ses dérives de consommation et gisements d’économie via le déploiement des compteurs intelligents ;
- des outils pour piloter ses équipements, via le développement de systèmes de smart home management, qui ne séduiront le plus grand nombre que s’ils permettent une intégration de tout le spectre des services à domicile (communication, domotique, énergie et eau, services d’assistance à la personne et de sécurité…) ;
- une rémunération immédiate sur la facture d’énergie des changements de comportements et d’équipements consentis par le consommateur via des offres tarifaires qui valorisent la réduction, voire l’effacement, des consommations en pointe.
Une politique volontariste et cohérente en matière de certificats d’économie d’énergie pourrait là encore favoriser la dynamique de l’offre, en intégrant dans le périmètre d’éligibilité non pas seulement des opérations sur le « hard » (renouvellement des équipements et rénovation du bâti), mais aussi des leviers d’accélération de l’évolution des comportements des consommateurs dans leur logement.
A quand l’éligibilité aux certificats d’économie d’énergie d’offres tarifaires permettant de réduire les consommations en pointe et de renforcer le modèle économique des opérateurs qui sauront innover en la matière ?
(1) L’habitat représente en France de l’ordre de 30% des consommations énergétiques et de 20% des émissions de CO2
(2) 96% des français déclarent agir pour réduire leur consommation énergétique dans leur logement ! – TNS Sofres 2009
(3) Moins de 3% de baisse des consommations énergétiques du secteur résidentiel de 2004 à 2007, essentiellement sur le chauffage, mais en partie compensée par le développement des usages des équipements électriques et électroniques dans les logements ; à noter une croissance continue des consommations d’électricité sur tous les usages, avec une augmentation globale de 8% entre 2004 et 2007 – Service statistique du MEEDDAT – consommation d’énergie (hors énergies renouvelables, mais y compris bois), corrigée des variations climatiques.
(4) Seulement 10% du parc français est équipé de compteurs individualisés contre 70% au Benelux et 95% en Allemagne. – AFP 2009
(5) Comparativement aux autres pays européens, la facture pour un ménage français est beaucoup plus faible, de l’ordre de 25% en électricité et de 30% en gaz.
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