Le portefeuille d’identité européen, l’identité régalienne numérique bientôt dans nos poches

Le besoin d’une identité numérique régalienne découle de la nécessité de garantir la fiabilité des échanges et transactions en ligne, face à la montée des fraudes dans un contexte de dématérialisation croissante. L’Union européenne a réagi en instaurant le règlement eIDAS en 2014, visant à favoriser l’interopérabilité des systèmes d’identification et d’authentification électronique au sein de l’UE.

L’identité numérique régalienne regroupe toutes les informations essentielles pour authentifier formellement un individu ou une organisation dans le monde numérique. Cela inclut les données d’identification personnelles, les certificats électroniques et les informations biométriques. Cette identité est cruciale pour sécuriser les transactions électroniques, faciliter l’accès aux services publics en ligne et protéger les droits et la vie privée des citoyens.

En France, un programme a été lancé en 2018 pour créer une identité régalienne numérique de garantie élevée. Parallèlement, la France s’engage dans la mise en place d’une carte d’identité à puce, qui constituera la base de cette identification électronique. Ce mode d’authentification sera intégré à FranceConnect+ créé à la fin de 2021, un service en ligne d’identification et d’authentification de niveau substantiel minimum.

Evolution de l'identité numérique régalienne en Europe

 

Exemples de cas d’usage en fonction de la cible :

 

Entreprises

 

Un cas d’usage B2E potentiel pourrait-être le réenrôlement et de la récupération d’accès. L’utilisation de l’identité numérique régalienne devient particulièrement pertinente dans les entreprises ou l’authentification des employés repose exclusivement sur des passkeys FIDO liées à un appareil, souvent leur téléphone. En cas de perte de ce dispositif, l’employé se trouve dans l’incapacité de s’authentifier. Grâce à l’identité numérique régalienne, la récupération d’accès devient simplifiée. L’employé peut utiliser son identité numérique pour restaurer ses accès, puis récupérer un nouveau téléphone et réenrôler ses passkeys FIDO. Ainsi, le processus de réenrôlement et de récupération d’accès est grandement facilité, garantissant une continuité de service accrue.  

Côté CIAM, les banques pourraient utiliser l’identité numérique régalienne pour vérifier l’identité des clients lors de l’ouverture de comptes en ligne ou lors de transactions sensibles et améliorer ainsi le niveau de sécurité de leur service et leur processus KYC (know Your Client). Actuellement en France, les clients peuvent utiliser FranceConnect pour s’authentifier auprès de banques telles que BNP Paribas lors de l’ouverture de comptes en ligne, garantissant une vérification d’identité sécurisée et simplifiée. De la même manière des sites de commerce en ligne pourraient utiliser l’identité numérique régalienne pour permettre aux utilisateurs de s’authentifier de manière sécurisée lors de l’achat de produits, renforçant encore la sécurité et réduisant les risques de fraude.

Dans le contexte de l’entreprise étendue (mode d’organisation permettant la collaboration entre une entreprise, ses filiales et ses partenaires), l’enrôlement sécurisé des partenaires pour accéder aux systèmes d’information (SI) de l’entreprise est crucial. Le défi consiste à augmenter le niveau de confiance de l’enrôlement tout en le facilitant.

L’utilisation du portefeuille d’identité européen ou autre wallet d’identité pourrait significativement simplifier et sécuriser ce processus. Les employés des partenaires pourraient prouver leur identité auprès de l’entreprise avec laquelle ils souhaitent collaborer en utilisant leur wallet d’identité. Voici comment cela pourrait fonctionner :

Premièrement l’enregistrement initial, les employés des organisations partenaires utilisent leur portefeuille d’identité pour s’enregistrer auprès du système de l’entreprise principale. On procède alors à la vérification de l’identité grâce à des certificats électroniques et autres informations sécurisées.

Une fois l’enregistrement validé, ces employés peuvent accéder aux systèmes d’information de l’entreprise principale. Le wallet d’identité permet une authentification sécurisée et conforme aux normes de sécurité de l’entreprise. Ou un enrôlement sécurisé à des moyens d’authentification locaux de l’entreprise.

Le wallet d’identité peut également être utilisé pour gérer et moduler les droits d’accès en fonction des rôles et des besoins spécifiques des employés partenaires, réduisant ainsi le risque de sur-approvisionnement et augmentant la sécurité.

Si les informations d’identité changent (par exemple, si un employé change de poste ou de responsabilité), la mise à jour des accès peut être effectuée de manière fluide via le portefeuille d’identité, sans nécessiter de processus administratifs lourds.

Imaginons une entreprise de construction collaborant avec divers sous-traitants pour différents projets. Les employés des sous-traitants peuvent utiliser leur portefeuille d’identité pour s’authentifier et accéder aux plans et documents de projet hébergés dans le SI de l’entreprise principale. Cela garantit que seuls les employés autorisés et vérifiés ont accès aux informations sensibles, et que leurs accès peuvent être rapidement modifiés ou révoqués en cas de besoin.

 

Citoyens

 

L’identité numérique régalienne offre aux citoyens de nombreux avantages, notamment en simplifiant l’accès à divers services en ligne et en renforçant la sécurité des transactions numériques. En France, par exemple, les assurés sociaux peuvent utiliser leur identité numérique via le service Ameli pour accéder à leur espace personnel. Cela leur permet de consulter leurs remboursements, de prendre rendez-vous avec des professionnels de santé et de gérer d’autres aspects de leur couverture médicale en ligne de manière sécurisée.

De même, pour les démarches fiscales, les citoyens français peuvent utiliser leur identité numérique régalienne via le site impots.gouv.fr. Cette fonctionnalité facilite la déclaration fiscale en ligne, permettant aux utilisateurs de remplir leurs déclarations, de consulter leurs avis d’imposition et de suivre leurs paiements et remboursements de manière simple et sécurisée.

Au-delà de la France, d’autres pays européens mettent également en œuvre des solutions d’identité numérique pour améliorer l’accès aux services publics. Par exemple, les étudiants pourront bénéficier grandement de l’identité numérique régalienne pour leurs démarches administratives. Ils pourront l’utiliser pour s’inscrire à des universités, accéder à leurs relevés de notes, et gérer leurs comptes étudiants de manière sécurisée et simplifiée. De plus, les étudiants internationaux pourront également utiliser cette identité pour valider leur statut de résidence et accéder à divers services publics et académiques sans le tracas des procédures papier.

En Espagne, l’identité numérique régalienne permet aux citoyens de signer électroniquement des documents officiels via le service FirmaDigital.gob.es. Cette solution est utilisée pour des tâches telles que la signature de contrats de location, la soumission de documents administratifs, et d’autres procédures nécessitant une signature légale. Cela rend les processus administratifs plus efficaces et sécurisés, en éliminant la nécessité de signatures physiques et en réduisant le risque de fraude.

 

Le portefeuille d’identité européen (EUDI)

 

Le portefeuille d’identité européen (EUDI Wallet) est une initiative majeure de la Commission Européenne visant à fournir aux citoyens de l’Union européenne un moyen sûr et interopérable de gérer leur identité numérique à travers les frontières. Conçu pour offrir une solution pratique et sécurisée, l’EUDI Wallet permettra aux citoyens de stocker et de partager leurs informations d’identification électronique de manière transparente, tout en préservant leur vie privée et en respectant les normes strictes de protection des données de l’UE.

Ce concept émerge dans le contexte de la numérisation croissante de la société européenne et de la nécessité de renforcer la confiance dans les transactions en ligne. Avec la diversité des systèmes d’identification électronique utilisés à travers l’UE, l’EUDI Wallet vise à harmoniser ces systèmes et à faciliter l’accès aux services numériques transfrontaliers, tels que les services publics, les transactions commerciales et les interactions en ligne avec les entreprises.

L’EUDI Wallet fonctionnera donc comme un portefeuille numérique sécurisé où les citoyens pourront stocker leurs informations d’identification telles que les certificats électroniques, les données biométriques et les documents d’identité. Ils pourront utiliser ce portefeuille pour s’authentifier en ligne et accéder à une gamme de services numériques à travers l’Union européenne.

Avec l’EUDI Wallet, les citoyens pourront accéder facilement à leurs données de santé, comme leur résumé de patient et leurs ordonnances électroniques, n’importe où dans l’UE, favorisant une meilleure continuité des soins. De plus, le wallet permettra de gérer et vérifier les diplômes et qualifications professionnelles de manière sécurisée, simplifiant ainsi la reconnaissance des qualifications et favorisant la mobilité des travailleurs. Enfin, il facilitera les transactions en ligne en assurant une authentification forte et harmonisée, renforçant ainsi la confiance dans le commerce électronique transfrontalier.

Afin de procéder à ces cas d’utilisations, la Commission Européenne a défini deux scénarios principaux décrivant très basiquement les flux d’utilisations du portefeuille ;

Deuw scénarios de flux d'utilisation du portefeuille

 

À ce jour, les pays de l’Union Européenne ont convenu du contenu à inclure dans le wallet européen et se sont accordés sur un standard global pour le projet, avec une date de mise en œuvre cible en 2026. Ce qui reste à accomplir comprend la finalisation du standard, l’élaboration des spécifications techniques précises de ce standard, ainsi que le développement des solutions techniques devant être mises en œuvre dans chaque pays européen pour assurer leur compatibilité avec le standard établi.

 

Conclusion

 

L’introduction du portefeuille d’identité européen (EUDI Wallet) représente une étape cruciale vers une Europe numérique plus intégrée et numérisée, offrant de nombreux avantages aux citoyens et aux entreprises à travers l’Union Européenne. En France, l’adoption de l’EUDI Wallet dépendra de plusieurs facteurs clés. Tout d’abord la mise en place d’un cadre réglementaire solide et conforme aux normes de protection des données telles que le RGPD sera essentielle pour assurer la confiance des utilisateurs et la sécurité de leurs données personnelles. De plus, la confiance du public dans la sécurité et la fiabilité de l’EUDI Wallet jouera un rôle déterminant dans son adoption généralisée. Des campagnes de sensibilisation et d’éducation du public sur les avantages et les mesures de sécurité de l’EUDI Wallet pourraient contribuer à renforcer cette confiance.

Cependant, l’élément le plus important pour l’EUDI Wallet sera le taux d’adoption par les services privés. L’implication des entreprises privées est cruciale car elles fournissent une grande partie des services utilisés quotidiennement par les citoyens. Une adoption généralisée par les secteurs bancaires, de la santé, de l’éducation, et d’autres services privés, assurerait une utilisation plus large et régulière du wallet, rendant son intégration plus fluide et naturelle pour les utilisateurs.

La technologie reste émergente et n’est pas encore assez mature pour être mise en place immédiatement. Toutefois, compte tenu des nombreux bénéfices potentiels, il est crucial de suivre de près cette technologie et de l’adopter dès que possible. Cela est particulièrement vrai pour le secteur bancaire et les cas d’usages de l’entreprise étendue, où l’EUDI Wallet pourrait apporter des améliorations significatives en matière de sécurité, de fluidité des transactions et d’efficacité opérationnelle.

Néanmoins, en surmontant ces obstacles et en tirant parti des opportunités offertes par l’EUDI Wallet, la France pourrait jouer un rôle de leader dans la construction d’une Europe numérique plus sûre, plus innovante et plus connectée pour les années à venir.

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