L’habit ne fait pas le moine – Ou l’importance du facteur humain dans la maîtrise du risque USB

L’USB est quasiment incontournable. L’interconnexion non maîtrisée des dispositifs avec le SI est facilitée par les comportements humains.
Les moyens d’attaques se perfectionnent et le risque s’accroît, notamment vis-à-vis des attaques ciblées.
Une vigilance toute particulière doit être accordée à son usage sur les périmètres les plus sensibles, du SI et des populations utilisatrices.
La prise en compte du facteur humain via une sensibilisation adaptée est une mesure essentielle ; les solutions techniques restent un complément d’efficacité variable.

 

L’IMPORTANCE DU FACTEUR HUMAIN

Selon la légende, un homme déguisé en moine pénétra sans attirer la méfiance dans une forteresse du sud-est de la France (actuel Monaco), une nuit de janvier 1297. Il put ainsi ouvrir à des soldats qui s’en emparèrent facilement. Il en va de même pour des attaques perpétrées à l’aide de dispositifs USB familiers, que l’utilisateur branche en tout confiance sur le port d’une machine.

Une étude publiée au Blackhat USA en 2016 a montré que 45% des 297 clefs USB disséminées sur un campus universitaire ont été connectées à des ordinateurs et leurs fichiers ouverts. Cette étude illustre bien la capacité à mener des attaques efficaces via des clefs USB et pour un coût minime.

Par ailleurs qui n’a jamais laissé un téléphone portable se recharger sur l’un des ports USB de son PC ?

Si la connexion au réseau fait le plus souvent l’objet de nombreuses mesures de sécurité, les autres portes que constituent les ports USB font, généralement, l’objet d’une attention moindre, sur les serveurs, les postes de travail et désormais les tablettes et smartphones qui intègrent la technologie USB On-The-Go.

Les dispositifs USB sont présents partout, tirant partie de l’interopérabilité de l’Universal Serial Bus.

Le revers de la médaille de ce développement historique et de sa compatibilité descendante, est qu’il n’a pas été techniquement conçu « security by design » et que ces dispositifs offrent une large surface d’attaque.

Figure -Vidéo illustrative de sensibilisation sur la sécurité des clefs USB

 

UN LARGE PANEL D’ATTAQUES RENDUES POSSIBLES PAR L’USAGE (PRESQUE) INCONTOURNABLE DES DISPOSITIFS USB ET AU MANQUE INTRINSÈQUE DE SÉCURITÉ DES STANDARDS HISTORIQUES

Les périphériques de stockage amovibles, clefs ou disques USB, peuvent servir de vecteur à la propagation d’un code malicieux. D’autres types de périphériques USB (ex : webcam, clef 4G) peuvent également intégrer une fonction de stockage amovible, par exemple pour faciliter l’installation du pilote logiciel du périphérique.

La provenance légitime d’une clef USB ne peut garantir entièrement son innocuité, si celle-ci a été compromise en usine ou avant l’envoi aux clients, comme cela a pu arriver récemment à un fournisseur de systèmes de stockage.

Par ailleurs, un périphérique USB d’apparence banale, peut avoir été reprogrammé ou modifié physiquement pour compromettre ou endommager le système sur lequel il est branché, par exemple :

Une clef USB peut également être utilisée pour attaquer des équipements sensibles déconnectés du réseau de l’entreprise, par exemple des équipements industriels, lorsque celle-ci est utilisée en « navette » avec des postes connectés internet, donc à un attaquant externe potentiel.

Il est également possible de tirer parti du rayonnement électromagnétique qui peut se produire au travers d’un périphérique/câble USB, d’un poste isolé de tout réseau, pour permettre à un code malicieux, introduit via le dispositif USB, d’exfiltrer des informations à quelques mètres.

Les attaques consécutives à la modification de périphériques USB restent encore limitées, assez ciblées et potentiellement très efficaces (ex : Stuxnet en milieu industriel). La mise au point de certaines de ces attaques est facilitée par les sources d’informations, les tutoriels et les outils librement accessibles sur Internet.

L’arrivée de l’USB-C, également utilisé comme alimentation électrique des nouveaux ordinateurs portables, peut contribuer à augmenter un peu plus la surface d’attaque (chargeurs, packs de batterie), tant que la compatibilité avec des standards non sécurisés devra être maintenue pour des raisons de compatibilité descendante avec les autres versions d’USB et dans l’attente de la généralisation de futurs chargeurs sécurisés.

 

LES CONTRE-MESURES DOIVENT ÊTRE CIBLÉES SUR LES RISQUES LES PLUS ÉLEVÉS (ET DONC ÉGALEMENT SUR L’HUMAIN)

L’évaluation des risques liés aux dispositifs USB doit permettre d’identifier les périmètres du SI et les populations vers lesquels cibler en priorité les contre-mesures :

  • Sensibilité des populations (VIP, mainteneurs, administrateurs systèmes …) ;
  • Sensibilité de l’équipement sur lequel il est possible de connecter un dispositif USB (poste utilisateur, poste sensible déconnecté du réseau, station d’administration, serveur, équipement industriel …).

La connexion d’un périphérique USB à un équipement passe par un choix humain. Il est donc essentiel de sensibiliser les acteurs, y compris leur management opérationnel, par des actions classiques (supports de communication des risques et des bonnes pratiques, …) voire plus innovantes (ex : disperser des clefs USB témoins remontant une alerte une fois connectées à un poste de travail, effectuer des démonstrations, organiser des jeux de plateau pour entraîner des populations plus ciblées à évaluer certaines prises de risque, …).

Les contre-mesures techniques sont un complément. Leur efficacité demeure toutefois variable.

  • Un antivirus pourra le plus souvent détecter un fichier infecté sur un périphérique de stockage USB avec la même efficacité que si ce fichier se trouvait sur un autre espace de stockage. Certains produits pourront n’autoriser la lecture du contenu d’un stockage amovible, que si celui-ci a préalablement été chiffré avec une clef permettant d’y accéder seulement depuis des postes de l’entreprise ;
  • Des équipements de ‘sas’ de décontamination peuvent également être utilisés pour sécuriser les échanges de fichiers entre une clef USB et le SI de l’entreprise ;
  • Des solutions logicielles permettent de contrôler la connexion d’un dispositif USB à des groupes de postes ou serveurs, en fonction de caractéristiques annoncées lors de son branchement. Il s’agit du moyen le plus répandu pour maîtriser la connexion des dispositifs USB. Cependant, un dispositif USB modifié peut dans certains cas arriver à tromper cette protection logicielle ;
  • Le marché propose également des clefs USB avec un micrologiciel sécurisé, qui permettent de s’assurer que celui-ci n’a pas été reprogrammé. Néanmoins, il reste toutefois possible d’introduire dans l’entreprise des dispositifs piégés reprenant ou imitant le packaging extérieur de clefs USB sécurisées ;
  • La neutralisation ou le blocage physique des ports USB, en particulier sur les postes les plus sensibles, tels que des stations d’administration ou des stations de conduite dans le milieu industriel, reste toutefois une solution assez efficace pour des périmètres spécifiques.

Nous devrons attendre encore un peu avant de pouvoir pleinement bénéficier d’une sécurité efficace portée par de nouveaux standards USB. En attendant, le parc non sécurisé et le risque s’accroissent. Pour y faire face, ne comptons pas uniquement sur des réponses techniques et ne négligeons pas le facteur humain.

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