La Banque en Ligne connaît de profondes mutations, tant sur le plan des enjeux métiers – avec des périmètres de plus en plus larges et de moins en moins ensilotés – que sur celui des enjeux règlementaires (Instant Payment, DSP2…). Les cas de fraude se multiplient et les schémas d’attaque menés par des fraudeurs de plus en plus aguerris se diversifient. Pour accompagner ces nombreux changements, les méthodes et les processus métiers se doivent d’être plus efficaces, mieux adaptés, et plus flexibles. Les méthodes de Machine Learning, malgré leur récente démocratisation, permettent d’épouser la révolution digitale de la Banque en Ligne.
Machine Learning, démystification et opportunités
Le Machine Learning est une forme d’intelligence artificielle qui consiste à apprendre et modéliser un phénomène pour mieux le comprendre et le maîtriser. Pour cela, un ou plusieurs algorithmes permettent d’établir des corrélations entre les évènements qui composent ce phénomène. On distingue deux grands types de méthodes :
- Les méthodes supervisées, qui créent des modèles à partir d’une base de données d’exemples (généralement des cas déjà traités et validés).
- Les méthodes non-supervisées, qui n’ont pas besoin d’une base de données d’exemples
Pour illustrer la différence entre les deux méthodes, on peut considérer le cas de la détection de fraude. Pour s’entraîner et créer des modèles précis, les méthodes supervisées utiliseraient en entrée des données déjà traitées et marquées comme étant liées ou non à des cas de fraude (schémas de fraude connus), alors que les méthodes non-supervisées utiliseraient des données brutes issues des applications du SI afin de modéliser les comportements normaux. Conceptuellement, cela revient à modéliser respectivement ce qui est anormal (la fraude – en ayant assez de données pour que cette représentation soit fidèle) ou ce qui est normal (en détectant de facto les fraudes lorsque l’on s’éloigne de cette normalité).
Tous les algorithmes ne se valent pas. Chacun possède des qualités et des défauts qu’il faut savoir peser et qui dépendent en grande partie des données d’entrée, propres à chaque cas métiers. Il est important de choisir des données à la fois pertinentes et disponibles en quantité suffisante pour obtenir des résultats probants. Dans le contexte de la Banque en Ligne, de nombreuses données peuvent faire l’objet de Machine Learning :
- Habitudes de transaction : montants des virements, pays destinataires…
- Habitudes de connexion : heure de connexion, user-agent, device utilisé…
- Habitudes de navigation : parcours client, vélocité de navigation…
- Données comportementales : vitesse de frappe, déplacement de la souris…
- Données marketing : produits consommés, libellés des virements…
Correctement exploitée par des algorithmes de Machine Learning, la conjugaison de ces différentes données, précédée par un traitement tirant le maximum de leur valeur, peut permettre des résultats bien plus significatifs que ne le permettent les méthodes classiques. La connaissance client (KYC), en exploitant par exemple le parcours client type, la détection de fraude, en utilisant les habitudes de virement pour identifier des cas suspects (pays de connexion, distribution des montants…), ou encore le marketing à travers la connaissance des habitudes de consommations (analyse des libellés, regroupements des achats par catégories…) peuvent notamment largement tirer parti de ces données.
Concrètement, quels sont les gains du Machine Learning ?
Tout d’abord, connaître le client et mieux adresser ses besoins
Le Machine Learning permet de tirer le maximum de valeur des données en singularisant les modèles là où les méthodes « classiques » reposent sur un modèle commun à l’ensemble des données d’entrée. Par exemple dans le cas de la détection de fraude, les modèles de règles « classiques » reviennent à élaborer un modèle qui sera commun à tous les clients, sans tenir compte de leur unicité, là où le Machine Learning permettra une détection plus efficace en associant un profil à chaque client et en effectuant une surveillance et une détection propres à ce profil. Ce raisonnement vaut pour tous les autres domaines d’applications, et permet, in fine, une meilleure représentation et une meilleure connaissance non plus « du client » au sens large, mais de chacun des clients.
Le Machine Learning permet également d’offrir de nouveaux services
Au-delà de l’amélioration notable des résultats basés sur les KPI classiques (taux de faux positifs, taux de détection…), le Machine Learning permet une création de valeur en termes de gains financiers en personnalisant les outils dont profite le client. Cela peut parfaitement servir de socle à une offre commerciale qui reposerait par exemple sur la personnalisation de ses seuils par le client ou sur la possibilité d’être alerté en temps réel lorsqu’une information marketing, commerciale ou concernant sa sécurité a particulièrement du sens. Certaines banques ont d’ailleurs déjà franchi le pas, en offrant la possibilité à leurs clients Entreprises d’être alertés en cas de virements qui dépassent des seuils personnalisés préalablement établis.
Finalement, le Machine Learning est aussi une occasion de moderniser les outils et rester à l’état de l’art
Lancer un projet de Machine Learning permet de communiquer sur le sujet et de profiter du buzzword pour générer de la satisfaction chez un certain nombre de client de plus en plus sensible à des problématiques de sécurité ou de confidentialité, tout en s’assurant d’être à l’état de l’art du marché. Cela peut également permettre de moderniser des outils existants en vue des changements qui vont continuer d’opérer dans la Banque en Ligne au gré des nouvelles règlementations et des exigences techniques (temps réel notamment avec Instant Payment) et métiers qui en découlent. Dans ce cadre, on voit par exemple éclore des méthodes de Machine Learning pour la surveillance des marchés et lutter contre les délits d’initiés.
En conclusion, la pleine maîtrise technique du Machine Learning coïncide avec de nouveaux besoins et de nouvelles exigences exprimés dans la Banque en Ligne moderne. Embrasser cette évolution présente de nombreux avantages, de l’amélioration des performances et des résultats à la satisfaction des clients, en passant par une meilleure flexibilité technique. La maîtrise des différentes méthodes doit permettre un renouvellement des traitements et des processus métiers, en les rapprochant du client (aujourd’hui ces méthodes sont plutôt transparentes pour lui). Dans le cas de la lutte contre la fraude, on peut par exemple imaginer de nombreux cas autour de l’alerting et des contre-mesures, comme une vérification par authentification forte en cas de suspicion, ou des informations reçues en temps réel pour mieux impliquer les clients.