Aujourd’hui, près de 15% des paiements sont réalisés par des acteurs non bancaires. Et le développement des Fintech, startup alliant les aspects « finance » et « technologies », ne devrait pas ralentir cette tendance. Ces nouveaux acteurs s’attaquent aujourd’hui à l’ensemble des pans métiers de la banque (levée de fonds, vente ou achat de devises, souscription à un emprunt, services de paiement) et se découpent en 19 catégories (selon le cabinet Venture Scanner).
La Directive de Services des Paiements : une première initiative
L’adoption par le Parlement Européen en 2007 de la Directive de Services des Paiements (DSP) et sa transposition sur le plan national en 2009 avait pour objectifs majeurs d’harmoniser les services de paiements de l’Union Européenne et de stimuler la concurrence. Mise à part le fait qu’à partir de cette adoption, il est possible d’effectuer et recevoir des paiements d’Allemagne, d’Espagne, du Royaume-Uni… aussi aisément qu’en France ; un nouveau statut d’Établissement de Paiement (EP) a été créé. Il permet à de nouveaux acteurs autres que les banques et les établissements de crédit de fournir des services de paiement. En France, les EP sont agréés par l’Autorité de Contrôle Prudentiel et de Résolution (ACPR).
L’héritage de cette première version concernait 3 types de Fintech : celles proposant des opérations de paiements associés à un compte (ex : Slimpay qui permet de générer des mandats de prélèvements électroniques), les transferts de fonds et les émissions d’instruments de paiement (ex : portefeuille électronique). Les plateformes de financement (crowdfunding) qui ne fournissent pas de services de paiement n’entrent pas dans le champ d’application de la DSP1. Elles sont par ailleurs réglementées par l’ordonnance du 30 mai 2014 en tant que service de financement. Celles qui perçoivent des fonds bénéficient jusqu’à présent d’une dérogation, du fait que le montant total de leurs opérations de paiement soit inférieur à 3 000 000 € sur un mois (article 26 de la DSP1).
De nouveaux types d’acteurs, un nouveau cadre réglementaire
Le développement des Fintech a fait apparaître de nouveaux services de paiements depuis la DSP1 : les services d’information sur les comptes (ex : agrégateur de données Bankin’) et les services d’initiation de paiement (ex : Sofort), autrement appelés les tiers de paiement (Third Party Providers ou TPP). Ces nouveaux acteurs, se connectant aux banques des utilisateurs via leur login/mot de passe bancaire, ne sont pas pris en compte par la DSP1 et engendrent de nouveaux risques (données n’étant plus sous la protection du secret bancaire, problématique liée aux responsabilités en cas de fraude, etc.).
La DSP2 (adoptée par le Parlement Européen le 8 octobre 2015 et qui devrait être transposée dans le droit national fin 2017) stimule toujours la concurrence tout en fournissant un nouveau cadre réglementaire adéquat entre les TPP et les banques. Concernant la DSP1, les contrôles sont effectués par l’ACPR, la CNIL et la DGCCRF et les sanctions peuvent aller jusqu’au retrait d’agrément de l’Établissement de Paiement (EP). La nouvelle version de la Directive laisse aux États membres la charge de définir le régime de sanctions à appliquer en cas de son non-respect, sanctions qui ne sont donc pour l’instant pas connues.
Extrait de l’article 103 de la Directive : « Les États membres déterminent le régime de sanctions applicables en cas d’infraction aux dispositions de droit national visant à transposer la présente directive et prennent toutes les mesures nécessaires pour en assurer l’application. Ces sanctions sont effectives, proportionnées et dissuasives ».
Une obligation pour les banques qui ouvre de nouvelles opportunités : la coopétition
La DSP2 impose aux banques de transmettre de façon sécurisée les données seulement nécessaires à l’activité des TPP et de rembourser le payeur en cas d’incident de paiement dans un délai de 1 jour (excepté si la responsabilité du TPP est engagée dans un incident de paiement, auquel cas, il doit lui-même rembourser immédiatement la banque). Pour autant, la directive ne précise pas les exigences techniques de sécurité auxquelles devront se soumettre les banques et les TPP. Le contenu des guidelines de l’Autorité Bancaire Européenne (prévus pour fin 2016) sera déterminant : les normes techniques devront prendre en considération l’éventail des risques inhérents aux nouveaux services de paiement.
Cette obligation peut être vue comme une opportunité pour les banques de développer des Open API. L’Open API est une interface de programmation qui permet à des tiers d’accéder à des ressources internes. Cet accès n’est pas forcément autorisé en lecture et en écriture à l’intégralité des données. La plupart du temps, il est limité et nécessite l’accord de l’utilisateur.
Les banques peuvent utiliser et promouvoir ces mécanismes afin de renforcer leur compétitivité, leur image de marque et proposer de nouveaux services plus rapidement en offrant la possibilité aux développeurs externes de créer de nouvelles applications à partir de l’Open API et en les rémunérant en échange. Ce mouvement est essentiel pour que les banques gardent la main sur l’innovation et les nouveaux services pour continuer à se différencier. Certaines banques ont déjà initié une démarche proactive et innovante en mettant en place un Open API soit ouvert au public (CA Store, Fidor Bank) soit restreint à des partenaires (Bradesco, Garanti).