Dans un précédent article, nous avons souligné à quel point les DSI se trouvent fortement impactées par la transformation des entreprises. Cela concerne au tout premier plan la répartition de leurs activités et des compétences associées. Dans ce contexte, nous avons pu dégager six tendances de fond afin de poursuivre notre réflexion sur l’évolution des compétences et des pratiques de gestion des ressources humaines.
1 – Une décroissance des activités historiques de la DSI
Qu’il s’agisse du développement, de l’exploitation ou de la supervision, les activités cœur de métier historiques des DSI présentent des rapports valeur ajoutée / coût généralement bas, alors même qu’elles peuvent être sous-traitées avec des niveaux de risque et d’investissement limités. Ce sont donc les premières candidates à l’externalisation. Sauf à recourir à des mécanismes de reprise du personnel par les prestataires, cela implique automatiquement de miser sur l’attrition naturelle des effectifs (départs en retraites et turn-over) et surtout de redéployer les collaborateurs concernés. Pour maximiser les bénéfices de l’externalisation, elle doit s’effectuer sur des pans entiers du SI, sur lesquels un fournisseur peut s’engager globalement, plutôt que de façon éparse, en touchant partiellement chaque activité. Les effectifs internes sur les périmètres concernés doivent ainsi être intégralement redéployés, soit en conservant leur métier initial mais dans un autre domaine fonctionnel, soit en évoluant vers un autre métier par exemple en passant de l’exploitation à la TMA ou vers des fonctions à plus forte valeur ajoutée (pilotage, architecture, innovation…).
2 – Un renforcement des fonctions pilotage de la DSI
En complément de ce mouvement, les DSI renforcent notablement les moyens de leurs structures de pilotage. Il s’agit d’activités indispensables à la survie d’une DSI fortement externalisée et souhaitant mieux maîtriser ses performances opérationnelles et économiques. Ce sont les fonctions de pilotage de prestations (VMO), de pilotage économique, de capacity planning, de gestion de portefeuille projet, etc.
3 – L’émergence de filières d’excellence en matière de développement
Pour autant, l’externalisation ne signifie pas une disparition pure et simple des activités historiques de la DSI. Bien au contraire, ce recentrage aboutit à la sur-spécialisation de ces activités et, in fine, à l’éclosion de filières d’excellence, en ligne avec les nouveaux enjeux des Métiers. En matière de développement, ceci se traduit par trois mouvements concomitants. Tout d’abord, en contrepartie de l’externalisation de pans complets du SI, une partie des équipes de conception et de développement se redéploie en tant que spécialistes des briques SI considérées comme stratégiques pour l’entreprise : applications ou infrastructures différentiantes, porteuses d’un savoir-faire ou constitutives d’une offre donnant un avantage compétitif déterminant.
En parallèle, des centres de compétences innovants se mettent en place, par exemple sur les technologies mobiles ou internet. Enfin, l’expertise méthode tire également son épingle du jeu, notamment grâce à la méthode agile ou l’essor du développement commando, qui permettent tous deux de réduire le time-to-market et de gagner en agilité.
4 – L’avènement d’expertises technico-fonctionnelles
Ce mouvement profite également aux fonctions plus récentes des DSI, indispensables à l’agilité et à la cohérence du SI : l’architecture d’entreprise et la sécurité. Elles sont garantes de l’alignement du SI sur le métier en allant au-delà des aspects les plus techniques de leurs missions. L’approche technique de l’architecture reste bien sûr indispensable pour assurer l’intégration de services tiers et la fiabilité du SI. Mais c’est en se renforçant dans sa dimension fonctionnelle, sur la base de la maîtrise des enjeux et processus métier, qu’elle maximise sa valeur ajoutée. La sécurité, quant à elle, doit intégrer la dimension maîtrise des risques, exprimés en termes business.
5 – La part belle à l’innovation
Intégralement tournées vers l’innovation, des cellules d’incubation et de développement de nouvelles compétences autour de sujets émergents comme le Cloud computing, le Big data ou les objets connectés, permettront d’accompagner les Métiers sur les nouveaux usages et opportunités amenés par ces technologies.
6 – Des rôles dédiés à la relation avec les Métiers
Enfin, il s’agit bien au final de déplacer le centre de gravité de la DSI pour en faire un véritable partenaire stratégique des Métiers. Elle doit ainsi se renforcer sur cet aspect en développant des rôles dédiés à la relation avec ces derniers : Client manager, Service delivery manager, Chef de projet solution, Business analysts et Experts fonctionnels, etc. Pour chacun de ces emplois, nouveaux ou préexistants, il s’agit de dépasser les aspects opérationnels pour se positionner en conseil des Métiers dans leur adoption ou leur usage de solutions IT.
L’agilité du capital humain, le nouveau Graal des DSI
Ces tendances ne sont pas nouvelles. Leur violence et leur radicalité, en revanche, sont inédites. Les évolutions qu’elles nécessitent sont loin d’être naturelles pour les collaborateurs de la DSI dont les profils, souvent très spécialisés, ne prédisposent généralement pas à de tels changements. Tout l’enjeu pour le DSI est donc d’anticiper ces évolutions et de les piloter dans la durée : il ne s’agit pas d’amener du jour au lendemain et de façon définitive la DSI de son état actuel à celui, idéal, décrit ci-avant.
L’objectif est bien d’améliorer progressivement la flexibilité de la DSI, de développer sa capacité à s’adapter rapidement aux évolutions de son environnement et d’accroître l’agilité de son capital humain, en lien avec la transformation des technologies, de ses offres et de ses pratiques.