Start-ups digitales, pure players, énergéticiens, entités agiles au sein de grands groupes… l’écosystème de la valorisation de la donnée dans l’énergie est composé d’acteurs aux profils et aux enjeux différents. Lors de l’Atelier qui était consacré à cette problématique en 2014, Solucom a justement permis de mettre en lumière deux points de vue cruciaux du marché : celui d’un énergéticien et celui d’une start-up. Voici dans ce 1er épisode les convictions de Fred Potter, Netatmo, sur le devenir du secteur de l’énergie.
Par analogie avec les transformations d’autres secteurs, quelles perspectives entrevoit-on sur le marché de l’énergie ?
En 20 ans, le secteur du high tech a subi de nombreuses transformations digitales et numériques, qui ont semblé surprendre les acteurs. Par exemple, des offres gratuites et illimitées dans les télécoms. Ces nouvelles offres séduisent les consommateurs et suppriment les intermédiaires.
Dans l’hôtellerie, les grands groupes se plaignaient des agents de voyage qui prenaient 25% de commission. Ils ont accepté l’arrivée des acteurs du digital comme Booking.com pour augmenter leurs marges. Résultat : la valeur est désormais préemptée par trois marchands dans le monde qui imposent leurs clauses aux hôteliers et captent l’essentiel de leur marge.
Cela vaut aussi pour l’industrie musicale avec l’arrivée de Spotify ou Deezer. L’énergie sera également concernée. C’est le sens du rachat de Nest par Google. Le géant du web est un spécialiste de l’interposition digitale. Ce rachat lui permettra de discuter directement avec le consommateur, pour lui vendre de l’électricité, de l’effacement…
Le salut des acteurs de l’énergie dépendra de leur capacité à proposer des produits attractifs. Il y a une demande sociétale pour cela, qui sera de toute façon servie.
Quel est le positionnement de Netatmo sur la valorisation des données ?
Notre business model est celui d’un équipementier. Les données sont un moyen d’étendre notre distribution. Nous en récoltons un volume très important, que nous pourrions valoriser en échange de nouveaux canaux de distribution.
Plus largement, nous offrons des solutions séduisantes, ergonomiques et simples grâce à une solution de gestion des données dans le Cloud. Notre offre est sans abonnement et nous proposons des services gratuits pour valoriser l’équipement, par exemple des benchmarks pour évaluer la performance énergétique.
Notre positionnement est résolument B2C : nous souhaitons déclencher l’adhésion du consommateur, avec un bénéfice direct et visible.
Que pensez-vous des partenariats entre start-ups et énergéticiens ? Qu’attendez-vous d’eux ?
Faisons une analogie avec les télécoms : dans les années 2000, à chaque fois qu’Orange voulait ajouter une fonctionnalité dans la Livebox, l’ensemble de ses fournisseurs devait l’intégrer dans leur système, ce qui entraînait un délai de 18 mois. À l’opposé, Free avait choisi une approche radicalement différente : la symbiose avec un seul fournisseur qui a démontré son efficacité en termes de time-to-market.
Netatmo veut proposer des équipements communicants pour créer le désir de piloter sa consommation énergétique. Nous les vendrons par tous les canaux possibles, notamment en développant une marque vers le consommateur lui-même, voire pourquoi pas via les énergéticiens. Nous n’avons pas les prétentions d’arbitrer le marché de l’énergie. Ce marché est fortement demandeur de partenariats. Tous les canaux vont se réveiller. Les clients vont demander à leur installateur de chaudière gaz de leur installer les thermostats gaz qu’ils désirent. Cela représente 71% de taux de pénétration pour nous. Les énergéticiens seront un canal de vente parmi d’autres.
Quels sont les perspectives pour le marché de l’énergie, sur les volets B2B et B2C ?
Sur le marché B2C des objets connectés, nous pensons que le pilotage des dépenses n’est pas le principal levier. Pour le consommateur final, c’est la problématique du confort qui domine, notamment via son pilotage. Toujours sur le B2C, la valorisation des données vers d’autres cibles par agrégation ne correspond pas à notre positionnement actuel.
Je connais moins le marché B2B car nous n’y sommes pas actifs. De nombreuses sociétés sont déjà positionnées sur les équipements de mesure et de pilotage énergétique. Il me semble que c’est une compétence essentielle du métier de gestionnaire d’énergie.