Regroupant tous les acteurs, internes et externes, impliqués dans la production et la distribution, la supply chain est devenue la colonne vertébrale de l’entreprise.
Rationalisée et optimisée depuis des années, elle est souvent devenue moins apte à résister aux chocs violents : un cas d’école pour le risk manager qui doit démontrer que la croissance n’a de sens que si elle est durable.
Une recherche de performance centrée sur le gain à court terme
Pour faire face à un environnement concurrentiel exacerbé, la supply chain a été parmi les premières fonctions mises à contribution pour réduire les coûts, via la rationalisation des canaux de distribution, le sourcing et l’off-shoring. Avec des résultats indéniablement à la hauteur des espérances et dont la presse économique se fait régulièrement l’écho1.
Mais ce faisant, les supply chains ont insensiblement et progressivement été fragilisées. Ainsi, ces cinq dernières années2 :
- 74% des entreprises ont allongé géographiquement leur supply chain,
- 70% ont réduit le nombre de fournisseurs sollicités pour une même fourniture,
- 63% ont eu recours à des fournisseurs implantés dans des régions à risque, régulièrement théâtres de perturbations majeures (tsunamis, ouragans, guerres civiles…).
Le résultat est là aussi sans appel : 75 % des entreprises interrogées ont connu au moins un incident majeur lors des deux dernières années, avec des conséquences parfois dévastatrices.
Quel rôle pour le Risk Manager ?
Dans ce contexte, le Risk Manager peut (doit) travailler main dans la main avec le responsable de la supply chain pour sensibiliser le management aux risques encourus (considérés comme « à très faible probabilité », ils sont rarement présents dans le top 10 suivi à haut niveau), et pour apporter aux décideurs les éléments poussant à des arbitrages plus équilibrés entre rentabilité court terme et résilience.
Ces éléments d’arbitrage découlent du plan d’action « classique » de maîtrise des risques :
- Analyse du fonctionnement global de la supply chain pour en identifier les vulnérabilités, et en déduire les scénarios de risque les plus probables et redoutés ;
- Ajout des informations « risque » (sur l’environnement, par exemple) dans le référentiel partenaires, en ouvrant si possible le panel aux acteurs alternatifs potentiels ;
- Vérification de leurs plans de continuité (participation aux tests dans l’idéal, au moins en tant qu’observateur) ;
- Simulation des scénarios de risque, pour évaluer la résistance globale de la supply chain.
Des solutions de bon sens
À l’issue de cette analyse, de nombreuses propositions d’amélioration sont envisageables, parmi lesquelles on peut citer :
- Le recours, autant que possible, à des partenaires locaux :
Cela permet en effet une meilleure communication (même fuseaux horaires, facilitation des rencontres) et l’élimination des ruptures dues aux incompréhensions. En outre, les temps de transport réduits limitent l’impact des ruptures de stock (délais de réapprovisionnement plus courts).
- L’utilisation d’un SI partagé entre les différents acteurs de la supply chain, pour faciliter la diffusion de l’information à l’ensemble des maillons
Une diffusion rapide des prévisions de commandes limite en effet le risque de rupture de stock, et permet de réduire les stocks de sécurité des maillons les plus amont.
Au final, le Risk Manager et le responsable de la supply chain ont donc une partition à 4 mains à jouer intelligemment, pour mettre ce sujet à l’ordre du jour du Comité des Risques… et faire en sorte que le prochain tsunami en Asie ne bloque pas nécessairement la production de voitures en Europe3 !
1 Un exemple parmi tant d’autres chez Renault.
2 Toutes les statistiques sont issues de l’étude de 2013 de l’APQC auprès de 165 grands comptes.
3 Impact du tsunami de 2011 sur la production de Honda au Royaume-Uni.